mardi 8 décembre 2009

Au feu sur le Nil

Je suis en compagnie de quelques Québécois et nous redescendons le Nil en felouque. Plusieurs Nubiens nous accompagnent, notamment le capitaine du bateau, Shaaban, et ses aides. Chaque soir, nous nous arrêtons sur la berge pour faire un feu, cuire le souper et passer la nuit. En général, pendant que les Nubiens s'activent à préparer la bouffe, les touristes qui m'accompagnent restent à bord du bateau, renfermés sous le cagnard qui sert d'abri.

Pas moi. J'aime mieux côtoyer nos hôtes. Même si je les trouve parfois un peu irresponsables.

⎯ Vous n'allez pas allumer un feu au milieu de ce tas d'herbes sèches avec ce vent de fou? que je demande, un soir, tandis que, effectivement, une bonne brise agite la savane qui marque cet endroit.

⎯ Ne t'en fais pas, me répond Shaaban. Ce n'est pas la première fois.

⎯ D'accord, mais il me semble.. ce vent...

⎯ Mais non, mais non.

Évidemment, mes craintes se justifient et voilà le feu du souper qui s'étend d'un arbuste à l'autre. En compagnie de 3 ou 4 Nubiens, je m'efforce d'éteindre chaque arbuste, qui à coups de pied, qui à l'aide de sable, qui avec sa veste... Tout à coup, ce que je vois me tire un cri tandis que mes Nubiens se roulent de rire. Le feu a pris dans l'amarre qui retient la felouque où sont regroupés, inconscients du danger, la gang de Québécois qui m'accompagnent. Je vois la flamme courir du noeud qui la retient au crochet d'amarrage jusqu'au bastingage. Le mât et sa voile ferlée sont directement menacés. On dirait une mèche qui se consume en se raccourcissant à chaque seconde.

Quand la corde pète, le bout incandescent tombe à l'eau et s'éteint. Mais la felouque part à la dérive. Je bondis pour attraper l'extrémité de l'amarre, plante mes talons dans le sable, m'arcboute et crie à mes copains nubiens de me prêter main-forte. Ils rient beaucoup trop pour ça. Finalement, quand je parviens enfin à ramener la felouque à bout de bras, que je réussis à l'aide de mes compagnons espiègles à rattacher la corde d'amarrage, je vois poindre la tête de l'une des Québécoises.

⎯ Qu'est-ce que vous avez à rire? demande-t-elle.

Personne à l'intérieur du bateau n'a eu conscience de quoi que ce soit. Tout danger écarté, je m'écroule de rire avec ma gang d'irresponsables. Aucun touriste ne saura ce qui s'est passé.

C'était il y a 10 ans. J'en ris encore.
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2 commentaires:

  1. ha c'est rigolo. Je te voyais en capitaine Haddock, sautant partout, et criant, bande de salamalek irresponsables ! Tu m'a bien fait rire.
    C'est vrai, que plus on descend dans le sud, et plus les gens sont cool. Un jour, je me suis retrouvée toute seule à Stockholm, avec mes tableaux, ignorant où se trouvait le rendez-vous avec un galeriste. Mes amis tunisiens, qui avaient organisé ce voyage, étaient arrivés en retard à l'aéroport de Roissy, et en bons machos, ne m'avaient bien sûr donné aucun document. J'ai trouvé un taxi avec une camionnette qui a pu charger mes tableaux et m'a déposée devant la galerie où j'ai attendu deux bonnes heures à me morfondre. J'avais l'air d'un squatteur, sur le trottoir devant la galerie, avec une énorme caisse de tableaux et les passants me regardaient intriguée. Heureusement, le galeriste est passé par là, pour vérifier un truc et m'a trouvée. Nous avons bu du champagne en attendant les copains qui sont arrivés 5 heures plus tard.

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  2. Les Africains disent toujours : les Blancs, vous avez des montres, nous, on a le temps.

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