dimanche 15 janvier 2012

La Dame de Panamá, extraits

Et une fois de plus, ne reculant devant rien pour réjouir le cœur des habitués de ce blogue, et à la demande générale (d'au moins une lectrice), voici un extrait du roman qui paraîtra en mai chez Hurtubise : La Dame de Panamá !


C'est sur moi, toujours, depuis mes douze ans, sur qui les hommes posent leurs regards, pour qui ils soupirent après mon passage. J'en pèche souvent par une sorte de vanité qu'il me faut bien confesser chaque dimanche si je veux recouvrer la pureté de mon âme avant de communier.

— Voilà qui est bien de votre âge, m'a réconfortée Fray Jesús à ma dernière confidence dans l'isoloir, mais n'oubliez pas, doña María, que ce péché s'exacerbe du fait que vous êtes mariée.

— Depuis deux ans, mon père. Dieu me pardonne.

— Il vous pardonne, allez ! Ce n'est pas si grave. Mais ne vous amusez plus à semer l'émoi dans le cœur des hommes de votre entourage.

Mais c'est plus fort que moi. Dieu m'a faite belle, Dieu m'a faite riche, et, pareille à un tableau soigné du plus grand des peintres, je me complais à faire étalage de mes traits et de mes soieries à qui veut les admirer.

La Dame de Panamá
© Éditions Hurtubise, 2012
Ah, pis, au yable, les dépenses ! Pour vous, je peux bien me mettre en frais. Voici un autre extrait :
— A... amiral ! Vous vous adressez à... à une femme mariée ! Je vous en prie. Il n'est pas séant que vous mettiez ainsi votre cœur à découvert.

Il lève vers moi un visage à demi masqué par le clair-obscur du couchant que jette la porte du balcon derrière lui. Pourtant, il me semble bien distinguer dans ses yeux la mouillure émouvante de la sincérité.

— Madame, moi aussi, je suis marié, et pourtant...

Je recule d'un pas supplémentaire afin de m'assurer que ses doigts ne caressent un ruban de ma robe qu'ils sont sur le point d'atteindre. Je l'interromps :

— Marié ! Vous également ! Mais voilà qui est de la plus grande déshonnêteté ! Cessez de me torturer et, de grâce, relevez-vous.

Il m'obéit, mais ce n'est que pour mieux réduire l'écart que j'avais tenté de creuser entre nous.

— Le mariage ne nous coupe pas de nos sentiments, señora. Dieu a voulu, en dépit de nos origines différentes, que nous nous rencontrions ; n'est-ce pas là la plus belle preuve de Son désir de voir lier nos destinées ?

— Nos destinées sont déjà liées. Et chacun avec quelqu'un d'autre !

— Nos sorts d'époux, certes, mais notre bonheur ? Je le pressens voué à nous unir vous et moi. Soyez sincère, votre cœur, que ressent-il à mon égard ?

— La question n'est pas là. Elle tient de nos passés respectifs. Nos cœurs ne sont plus libres.

— Pourquoi nos mariages nous couperaient-ils du bonheur ?

— Mais, amiral, une femme qui se marie renonce au bonheur !
La Dame de Panamá
© Éditions Hurtubise, 2012

4 commentaires:

  1. J'aurais voulu dire le plaisir éprouvé en regardant la couverture du prochain roman mais il est impossible de lire les commentaires ou d'en laisser un. Je le dis aujourd'hui.
    Merci pour les extraits qui invitent à lire l'ouvrage en espérant ne pas y trouver l'hémoglobine d'Un massacre magnifique "
    Claudette

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  2. Hmmm... Avez-vous lu Un Massacre magnifique, Claudette ? Il n'y a pas tant d'hémoglobine que ça.

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  3. Usted es el mejor! Vous m'avez fait vraiment plaisir avec ces deux extraits.C'est tellement bien écrit. Aussitôt que ce superbe livre sort en librairie, je cours l'acheter! Merci Camille! Francine

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