mercredi 30 juillet 2008

Extraits légers

Pour faire plaisir à Claudette et à Sylvie qui trouvent que les extraits placés dans mon blogue sont trop souvent choisis en fonction de leur violence, voici 2 passages plus légers de Pirates III - L'Emprise des cannibales.

Contexte : La jeune et jolie Indienne du nom d'Anahi vient de cracher dans les oreilles et dans la bouche de Lionel, un mousse de 15 ans.

« — Mais qu'est-ce que tout ça signifie? m'informai-je à Urbain, mi-intrigué mi-irrité.

— C'est une croyance de ces Naturels, répliqua mon compagnon. Ils se figurent qu'en crachant dans nos oreilles, nous entendrons mieux leur langue et en crachant dans nos bouches, nous apprendrons plus rapidement à la parler. Tu as l'heur d'avoir subi l'expérimentation de cette jolie garce, et moi, de mon côté, c'est mon hôte qui m'a demandé de cracher dans sa bouche afin qu'il apprenne à parler français. Je présume que Baccámon voudra enseigner la même chose à Santiago.

¡No quiero! Hé, hé! s'exclama notre brave strabique dont les ricanements nerveux juraient souvent avec son expression. Je ne veux pas. Hé, hé! ¡No quiero!

— Mordiable! s'écria Grenouille en désignant Anahi de l'embout du pipeau qu'il venait de recevoir des mains de son hôte. Qu'un minois plaisant comme celui-là me propose épreuve de la sorte et j'apprendrai jusqu'au grec et au latin. »

Et un deuxième :

Le taille-mer de l'Ouragan soulevait une lame de proue coiffée de belle crème, tranchant l'eau ainsi qu'une fine rapière découperait la soie. Les vagues s'ouvraient avec douceur et, bien qu'une allure largue les poussât en partie contre la coque, le galion les absorbait avec souplesse, renvoyant les pans liquides glisser le long de ses flancs pareil à une caresse. Le roulis se voulait à peine perceptible, noyé dans le tangage de la marche. Les embruns se jetaient sur l'étrave non pas avec agressivité, mais comme la chevelure d'une femme nous viendrait frôler les joues par les caprices d'une brise.

Au château de poupe, mains sur la lisse du garde-corps jouxtant l'échelle, Cape-Rouge et le cacique, côte à côte, échangeaient des souvenirs, des impressions, riaient, se racontant mille choses que les ans avaient accumulées. Le pirate était vêtu de son inséparable mante écarlate qui, par moments, claquait au vent ou, en d'autres instants, se gonflait telle la corolle géante d'un coquelicot ; son chapeau de feutre au large bord, comme une fantaisie des deux mondes qu'il fréquentait, arborait ruban de sergette et plumes de perroquet. À son ceinturon pendait un fer de Tolède, une lame moins lourde à abattre qu'un sabre, mais plus facile à manier et plus dévastatrice quand on savait user de certaines bottes. Un pétrinal un peu lourd arquait le rebord de ses chausses.

Le cacique, quant à lui, nu hormis un pagne de gossapin à la hauteur du sexe, la peau peinturluré de rocou, ses longs cheveux noués sur les reins et ornés de plumes et d'or, des bracelets tintinnabulant aux poignets et aux chevilles, n'affichait pour toute arme qu'un poignard à la taille. Visage vers le ciel, narine dilatées, yeux mi-clos, il confia:

— Il y a longtemps que je n'ai goûté le plaisir de voguer sur un vrai navire. Pagayer dans une piragua ou, même dans plus grand, un canobe, ne procure l'ivresse de sentir ainsi la mer sous ses pieds, de danser sur ses vagues, de respirer son vent, son poudrin. Je dirais presque que la navigation me manque.

— On ne peut pas en dire autant de tous tes lascars, ricassa Cape-Rouge en désignant du menton les sept ou huit puissants guerriers kalinagos qui, penchés au bastingage, vomissaient à tire-larigot. Qu'est-ce que ce sera si on a à cingler par un vrai vent de travers !


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