jeudi 28 mai 2009

La Mer

La mer.

Au-delà de nos souverains, de nos contrées, de nos patrimoines, au-delà du paganisme, du papisme et du calvinisme, au-delà du français, de l'espagnol, du portugais, de l'anglois, du toscan, de l'arawak et du caribe...

La mer.

Notre patrie. Notre famille. Notre religion. Notre langue.

La mer, comme la mère, qui nous chérit et nous hait en même temps, avec ses bras aimants et ses caresses, son sein nourricier et sa sécurité, sa sérénité, mais aussi avec ses colères et ses furies, ses rejets et ses regrets, la mer qui nous engloutit un jour et nous vomit le lendemain, nous transporte un moment, nous repousse l'instant d'après, nous attire et nous effraie, effleure, frappe, éclaire et enténèbre, mouille et assèche, la mer, éternelle contradiction d'elle-même, à la fois coupable et Némésis, mortelle et irrésistible, ses horizons vides, son ventre plein, de la vie qu'elle abrite, de la mort jamais loin, la mer pourvoyeuse, la mer généreuse, la mer homicide, notre fratrie, notre foyer, la mer, notre mère.

— Comment vont tes progrès en écriture?

Cape-Rouge me posa la question tandis qu'il nouait la mante sur ses épaules avant de quitter la cabine.

— Fort bien, capitaine. Du moins, je crois que Le Jésuite est satisfait de moi.

— J'en suis bien aise, rétorqua-t-il en me jetant de ces regards qu'il avait parfois, un peu paternels, et qu'il accompagnait toujours d'une grosse main lourde sur notre épaule. Vraiment.

En plaçant sur sa tête son feutre à larges bords et coiffé d'une plume de perroquet, il m'invita à sortir en précisant:

— Tout de même, je m'informerai auprès du Jésuite à savoir s'il est aussi optimiste que toi.
Extrait de
Pirates IV ; Les Armes du vice-roi
À paraître, automne 2009

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